De gauche a droite : Prophèt G (Kill Point) - Lord Kemy (Legitime Défense) - Ksan-K (gandal Foly) - Natu (NGM) - Lord Aladjiman (Sillatigui) - Fadjidih (Pap Soul) - Mista X ( Fac Alliance) - Ras Condel (Raisonnable Djeli)
De gauche a droite : Prophèt G (Kill Point) - Lord Kemy (Legitime Défense) - Ksan-K (gandal Foly) - Natu (NGM) - Lord Aladjiman (Sillatigui) - Fadjidih (Pap Soul) - Mista X ( Fac Alliance) - Ras Condel (Raisonnable Djeli)

Du mythe à l’oubli : que reste-t-il de la mémoire des pionniers du rap guinéen ?

Ils ont fait vibrer les ghettos de Conakry, bousculé les codes établis et imposé leur vision d’un rap conscient, social, ancré dans les réalités guinéennes. Kill Point, Légitime Défense, Gandal Foly, Raisonnable Djely, Fac Alliance, Mifa Gueya, Pap Soul, Méthodik, Idéal Black Girl, DemonX, Alkebulan, Dudda InchAllah, Sillatigui, M.A.S… autant de noms qui, dans les années 1990 et 2000, incarnaient la voix des sans-voix, la résistance sonore d’une jeunesse en quête d’expression.

À l’époque, chaque morceau était une prise de position. Chaque scène, un manifeste. Ces groupes n’étaient pas que des artistes : ils étaient les porte-drapeaux d’une génération qui refusait le silence. Kill Point composé de Aïzeko, Prophète G et Mooz B, ouvrait la voie au revendication sociale et à l’international, pendant que Gandal Foly (Biz Dondon, Ksan-K et Dieng) injectait de la réflexion dans le rap local. Fac Alliance (Nondi K (RIP), Mista X et Pag G) expérimentait des fusions musicales audacieuses, ou encore Méthodik (Bougui Basta, Nondi K, Style Crazy et Sindela) posait un regard tranchant sur les dérives sociales.

Mais avec le temps, cette flamme s’est peu à peu éteinte. Leurs voix, autrefois si présentes, se sont tues. Loin des projecteurs, nombreux sont ceux qui ont pris le chemin de l’exil, confrontés à l'absence de structures, au manque de moyens, ou simplement à la lassitude d’un combat trop long. D'autres ont été freinés par des épreuves personnelles ou des conflits internes, qui ont empêché leurs projets de voir le jour. Et le silence s’est installé.

Ce silence, plus qu’un éloignement artistique, a creusé un fossé générationnel. La mémoire s’est effacée, faute de transmission. Les jeunes pousses du rap guinéen, nourries à la trap et à l’afro-rap, connaissent peu voire pas ces figures fondatrices. À force de ne plus sortir de projets, de ne plus monter sur scène, de ne plus raconter leur parcours, les anciens ont perdu la main sur leur propre héritage.

Certains noms survivent dans les souvenirs de quelques passionnés ou dans les samples timides de la nouvelle génération, mais la majorité est tombée dans l’oubli. Pas parce qu’ils n’ont pas compté. Mais parce qu’ils ont laissé le temps, et l’industrie, les effacer.

Et pourtant, leur impact reste indélébile. Ils ont pavé la voie. Ils ont posé les premières pierres d’un mouvement qui, aujourd’hui encore, s’affirme comme l’un des plus puissants leviers d’expression urbaine en Guinée. Il est peut-être temps de leur rendre ce qui leur revient : une place dans l’histoire. Pas comme des légendes mortes, mais comme des repères vivants d’un rap qui n’a jamais cessé de chercher sa voix.

 

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